Réfugiés : APRÈS L’ÉPISODE TURC, LE LIBYEN DANS TOUTE SA GLOIRE… par François Leclerc

Billet invité.

L’entrée d’un patrouilleur italien dans les eaux territoriales libyennes a suscité une vive réaction de Khalifa Haftar, qui dispute le pouvoir à Fayez al-Sarraj. L’un s’est autoproclamé maréchal de l’Armée nationale libyenne (ANL) et contrôle une large partie du territoire libyen adossé à la frontière avec l’Égypte, l’autre est le premier ministre du gouvernement reconnu par la communauté internationale de Tripoli.

Tout étant sujet à confrontation entre eux deux, Khalifa Haftar, qui revendique le contrôle de 1.300 kilomètres du littoral libyen, a donné immédiatement l’ordre à l’état-major de la marine d’empêcher l’entrée de tout navire étranger dans les eaux territoriales libyennes sans autorisation de l’ANL. La participation des navires italiens au blocage des réfugiés démarre décidément sous de mauvais auspices.

L’intervention destinée à brider les opérations de sauvetage des ONG a simultanément pris corps. Le séquestre du navire Iuventa, qui bat pavillon danois, a été ordonné dans le cadre de l’enquête menée par un procureur de Sicile. L’équipage de l’ONG allemande Jugend Rettet (les jeunes sauveteurs) est accusé, photos datées du 18 juin à l’appui, « de favoriser l’immigration illégale », coupable selon le procureur de connivence avec des passeurs afin de récupérer en mer des réfugiés dont la vie n’était pas en danger.

Jugend Rettet, qui réclame sur son site la mise sur pied d’un « programme centré sur le sauvetage des urgences maritimes et la décriminalisation de la quête de l’asile et d’un refuge » s’est dans l’immédiat contentée de réaffirmer sa position de principe : « pour nous, le sauvetage de vies humaines est et restera notre première priorité ». Sans vouloir se faire son interprète, cela semble pouvoir signifier créer l’ébauche d’un couloir humanitaire

Confrontées à des situations de détresse, toutes les ONG sont parfois conduites, pour les besoins de la cause, à s’impliquer sur le terrain plus qu’elles ne seraient censées le faire, et il y a une grande hypocrisie à leur reprocher quand cela intervient. Dans le cas présent elles permettent aux réfugiés de fuir l’enfer qu’ils connaissent en Libye.

L’attitude des autorités italiennes est à rapprocher des poursuites engagées en France envers ceux qui aident les réfugiés, au risque d’être assimilés à des trafiquants, avec comme unique défense qu’ils n’en tirent aucune contrepartie. Les ONG interviennent par défaut devant la carence des États, ce sont eux qui devraient être sur le banc des accusés.